lettre de la ffmc à manuel valls pour essayer de faire valser le brassard!!
de l’Intérieur
M. Manuel Valls
Place Beauvau
75008 Paris
Le 6 novembre 2012
Nos réf. : L48-12
A l’attention de Manuel Valls, Ministre de l’Intérieur
Monsieur le Ministre,
Suite au courrier que nous vous avons fait parvenir début juillet, nous revenons vers vous pour
connaître vos intentions sur différents sujets qui concernent les usagers de deux et trois roues
motorisés et plus particulièrement la question du décret du 3 janvier 2012 portant notamment sur
des équipements rétro-réfléchissants supplémentaires obligatoires.
Alors qu’une concertation engagée par l’Etat regroupant tous les acteurs de ce domaine
travaillait depuis juin 2009 à l’amélioration de la sécurité des deux-roues motorisés, l’annonce de
cette mesure qui prétend répondre au manque de visibilité des usagers à deux-roues est une
mauvaise réponse à une bonne question : la prise en compte des usagers vulnérables… Cette
prise en compte ne doit pas se réduire à les « marquer » en espérant que cela les rendra plus
résistants aux accidents dont ils sont victimes. La question de la « visibilité » de ces usagers n’est
pas un problème supposé de leur « invisibilité » : cette question a été clairement identifiée par les
experts qui y travaillent, comme l’IFFSTAR ou la FFMC et ses structures notamment. En effet, les
deux-roues motorisés ont déjà obligation d’allumer leurs feux en toutes circonstances et ils sont
coiffés d’un casque doté de dispositifs luminescents. Ils sont donc déjà très visibles.
L’annonce, il y a dix mois, de cette mesure décrétée unilatéralement et sans concertation avec
les intéressés a déclenché leur incompréhension et la colère des motards. Pire, elle génère à
nouveau de la défiance vis-à-vis des autorités, entraînant un rejet - et c’est très dommageable -
des questions de sécurité routière sur lesquelles nous travaillons avec les services de l’Etat.
Ce décret obligeant au port de surfaces rétro-réfléchissantes supplémentaires en toutes
circonstances est inadapté car il suppose une réflectance pourtant inopérante en plein jour alors
que les accidents de moto ont lieu majoritairement de jour par beau temps.
Il ne vise que les motocyclistes en plus de 125 cm
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formés au permis A et usagers bien mieux
équipés que les conducteurs de cyclomoteurs et de motocyclettes légères qui restent non
concernés par ce nouveau règlement
Cette nouvelle obligation ne réglera pas la cause majeure d’accidentalité des adeptes du
deux-roues : plus de la moitié des accidents mortels de deux-roues motorisés sont dus à
l’inattention des conducteurs qui se sentent à l’abri dans des véhicules carrossés. Il faudrait
commencer par renforcer la sensibilisation de ceux-ci pour faire baisser durablement le nombre
d’accidents graves et cesser de transformer les victimes en coupables. 2
Enfin, cette mesure annoncée par votre prédécesseur est injuste puisqu’elle expose la ou le
motocycliste, même bien équipé de la tête aux pieds, à un retrait de deux points sur son permis
de conduire si son équipement ne comporte pas 150 cm
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de surfaces rétro-réfléchissantes.
Rappelons que les automobilistes, tenus d’avoir à bord de leur véhicule un gilet de haute visibilité
en cas de panne, n’encourent qu’une simple amende en cas de verbalisation.
En outre, faudra-t-il fournir un mètre-ruban et une calculette aux agents de la force publique
chargés d’intercepter, de contrôler et de mesurer les contrevenants ?
Marc-Pierre Mancel, délégué général de la campagne du Président Hollande, que nous avions
rencontré le 25 mars, s’étonnait lui-même de la mise en place d’une telle mesure qu’il jugeait
totalement inefficace.
Contre ce décret, la FFMC a déposé un recours en annulation devant le Conseil d’Etat, mais
la réponse ne sera certainement pas connue avant le 1
er
janvier 2013, date à partir de laquelle le
décret est censé s’appliquer. La situation devient donc urgente.
Monsieur le ministre, vous-même, vos proches, vos camarades, le Président en personne et
certains de vos collègues (sans oublier l’actuel délégué interministériel, Monsieur Péchenard)
roulez ou avez roulé à deux-roues motorisé… Vous savez que pour les deux-roues, le danger
vient essentiellement de la distraction des automobilistes ou de l’imprudence du motocycliste et
que le port obligatoire d’un brassard n’y changera rien.
Nous estimons que pour être acceptés, les enjeux de sécurité routière doivent d’abord être
compris, pour que les conducteurs se les approprient et qu’ils puissent, à leur tour, s’en faire les
précepteurs.
C’est pourquoi nous souhaitons vous rencontrer et vous demandons d’abroger ce décret du 3
janvier 2012, ou si vous préférez, d’y surseoir avant la fin de l’année, le temps que nous trouvions
ensemble une solution plus adaptée et plus égalitaire pour les intéressés. Ceci ne coûtera pas un
euro à la collectivité et rétablira la confiance de la communauté des motards envers le
gouvernement.
Par la présente, nous vous reformulons nos voeux pour vous aider à accompagner vos actes à
venir en matière de sécurité routière, dans le cadre partenarial auquel vous nous savez attachés,
motivés et experts. Le « C » de la Fédération des Motards en Colère est aussi celui de la
Concertation et de la Citoyenneté. La Sécurité routière, faisons-la ensemble, avec, par et pour les
usagers et non contre eux.
Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression
de nos respectueuses salutations.
France Wolf
Coordinatrice du Bureau national